Le Parti
libéral du Québec (PLQ) a pris des engagements au cours de la dernière campagne
électorale en vue d’appuyer les exportations des PME. L’un d’entre eux est
libellé comme suit :
«Offrir un crédit d’impôt de 50 %
à l’exportation aux PME sur les coûts de transport liés aux activités d’exportation,
du point d’origine au point de destination. Ce crédit d’impôt s’appliquera aux
exportations interprovinciales et internationales. Ce crédit d’impôt aidera
davantage les entreprises les plus éloignées des centres de distribution. Il
incitera les entreprises à percer des marchés plus distants. Une entreprise
pourra ainsi déduire 150 % de ses coûts de transport dans le calcul de son
revenu imposable.»
Or, un
tel crédit d’impôt, s’il devait entrer en vigueur, ne serait pas conforme à l’Accord
sur les subventions et les mesures compensatoires de l’OMC, Accord auquel le
Québec a adhéré au milieu des années 1990. La liste exemplative de subventions
à l’exportation (annexe 1 de cet Accord) indique, entre autres, ceci :
« f) Déductions spéciales
directement liées aux exportations ou aux résultats à l’exportation qui, dans
le calcul de l’assiette des impôts directs, viendraient en sus de celles qui
sont accordées pour la production destinée à la consommation intérieure.»
Il est
ainsi bien évident que le crédit d’impôt proposé par le PLQ constituerait une
subvention prohibée au sens de l’article 3 de l’Accord précité.
Il existe
bien des façons d’appuyer les PME, exportatrices ou non, sans contrevenir aux règles de
l’OMC, et les gouvernements les ont utilisées abondamment au cours des
dernières décennies. En fait, si une contribution financière gouvernementale (subvention,
crédit d’impôt, etc.) n’est pas subordonnée aux résultats à l’exportation ou à
l’utilisation de produits nationaux de préférence à des produits importés, elle
n’est pas prohibée. Elle peut cependant être examinée par le gouvernement d'un
pays importateur en vue d’imposer éventuellement un droit compensateur si elle
procure un avantage à l’exportateur, si
elle est spécifique et s’il en résulte un préjudice pour les producteurs de ce pays.
Le
dossier des subventions et droits compensateurs est relativement calme ces
années-ci, en comparaison des années 1980 et 1990, en particulier dans les
relations commerciales canado-américaines. La dépréciation du dollar canadien
vient améliorer la capacité concurrentielle des entreprises québécoises ces
temps-ci. Il ne faudrait pas donner prise à leurs concurrents étrangers en
mettant en évidence le soutien que le gouvernement peut leur accorder et ce,
avec, par exemple, une mesure qui irait à l’encontre des engagements
internationaux du Québec et du Canada.
Au-delà de la conformité de ce crédit d’impôt aux accords commerciaux
internationaux, est-ce que cette déduction fiscale additionnelle ne deviendrait
pas une incitation pour les entreprises de régions éloignées à desservir des
marchés québécois à partir d’entrepôts ou de centres de distribution localisés
à l’extérieur du Québec?
Un exemple : un fabricant de l’Est du Québec veut élargir sa clientèle
et, pour ce faire, il souhaite vendre une partie de sa production dans la
région de Gatineau et dans la région d’Ottawa. Où va-t-il choisir de localiser
éventuellement son entrepôt ou son centre de distribution? Dans l’est ontarien,
où il bénéficiera d’une déduction fiscale de 150 % sur ses coûts de transport,
ou bien, dans la région de Gatineau où cette déduction serait de 100 %? S’il
choisit l’est ontarien pour des raisons fiscales, l’investissement et les
emplois qui y sont associés iront aussi là.
Si le nouveau gouvernement tient à donner suite à cet engagement électoral,
ne vaudrait-il pas mieux que la déduction fiscale de 150 % des coûts de
transport s’applique aussi bien au marché intérieur qu’aux marchés extérieurs
afin d’éviter des effets pervers? Qui plus est, sa proposition ainsi modifiée
ne constituerait pas une subvention prohibée au sens des accords
internationaux.
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