La revue The
Economist du 5 avril dernier (page 31) publie un graphique de Claire Durand
de l’Université de Montréal qui présente bien l’évolution de l’appui à la
souveraineté du Québec par groupe d’âge chez les francophones. Les données de
Mme Durand avaient aussi fait l’objet d’un commentaire de Lysiane Gagnon dans
sa chronique «A dim future for sovereignty»,
publiée le 26 mars dernier dans le quotidien The Globe and Mail.
D’après ce graphique, chez les 18-34 ans, l’appui à la
souveraineté est passé d’un peu plus de 60 % en 1979 et 1995, à un peu moins de
40 % en 2013. Chez les 35-54, il est passé d’environ 35 % en 1979, à un peu plus
de 60 % en 1995, pour descendre à un peu plus de 40 % en 2013. Chez les 55 et
plus, il est passé d’environ 20 % en 1979, à un peu moins de 40 % en 1995 et à
un peu plus de 40 % l’an dernier. Le seul groupe où l’appui à la souveraineté a
poursuivi son ascension, c’est donc chez les 55 ans et plus, bien que cet appui
soit à peu près du même ordre de grandeur dans les trois groupes d’âge en 2013,
soit plus ou moins 40 %.
Ces chiffres m’ont rappelé la campagne électorale de 1970. J’étais allé
à un rassemblement politique du Parti Québécois à Mont-Joli, municipalité du
Bas-du-Fleuve. Environ les deux tiers des personnes présentes n’avaient pas
encore l’âge de voter. La salle ne pouvait contenir toutes les personnes qui
voulaient y entrer. Il y avait une ambiance survoltée, et on nous faisait écouter
à maintes reprises le refrain «Québécois, nous sommes Québécois, le Québec
saura faire s’il ne se laisse pas faire, etc.» du groupe «Les Sinners», devenu «La
révolution française». L’atmosphère atteignit son comble lorsque le
charismatique et tribun par excellence qu’était René Lévesque, prît la parole. Les jeunes de cette époque sont, bien
évidemment, les 55 ans et plus d’aujourd’hui.
Quelques jours plus tard, j’étais allé dans la même salle où se tenait,
cette fois-là, un rassemblement politique de l’Union nationale (UN). Seulement
10 % des sièges étaient occupés, et la très grande majorité des gens avaient
plus de 50 ans. J’étais probablement le seul «jeune» présent.
Il y a environ deux ans, j’ai vu à la télé des images d’un brunch
dominical où Pauline Marois et Gilles Duceppe étaient présents. J’ai cru, un
instant, n’y apercevoir que les têtes blanches que j’avais vues en 1970 au
rassemblement de l’UN, mais, à bien y penser, je me suis fait la réflexion que c’était
plutôt les jeunes de 1970 qui avaient bien changé, du moins physiquement.
Par ailleurs, Jeffrey Simpson, dans sa chronique, publiée
le 12 avril dans The Globe and Mail,
écrit, entre autres, ceci :
«For example, here’s a little telltale from the Quebec election. An organization called Forum jeunesse runs an electoral awareness campaign for about 70,000 students, 12 to 17, in 350 Quebec schools. Students follow the election, talk about it and are given material from the electoral officer.
Then, a mock vote is taken. Not too long ago, chances are the Parti Québécois would have come first. A few decades ago, the PQ might have won a landslide.
But the mock vote produced a result of Liberals 36 per cent, Coalition Avenir Québec 21 per cent, PQ 18 per cent, Québec Solidaire 13.5 per cent. These students were not of voting age, so the results were hardly scientific. But at the very least, they suggest that the PQ isn’t what it used to be among the young. Which, in turn, doesn’t bode well for the party’s future. »
André Laurendeau a déjà écrit : «Il est normal qu’on soit séparatiste à vingt-cinq
ans, cela devient plus inquiétant si on l’est encore à trente-cinq»*. Il serait
probablement étonné d’apprendre que, de nos jours, chez les 55 ans et plus, l’option
de la souveraineté est à un peu plus de 40 %, et à un peu moins de 40 % chez
les 18-34, et de constater que plus on est jeune, moins l’option souverainiste
reçoit des appuis.
Enfin, voici le dernier paragraphe de l’article de The Economist où l’on retrouvait le graphique de Mme Durand auquel j’ai référé au début de mon commentaire :
«Claire Durand, a sociologist at the
University of Montreal, speculates that the sovereignty issue has been defused
for younger Francophone voters because of measures taken by successive
governments to boost protection of the French language at school and in the
workplace, and to acquire more control over the economy and immigration.
Maurice Pinard of McGill University, who conducted the first poll on support
for sovereignty in Quebec in the early 1960s, sees separatism as a social
movement taken up by one generation and dropped by the next. If so, the
question for the PQ is what it really stands for. »
* Extrait d’un éditorial du quotidien Le Devoir du 8 mars 1961, repris dans «Québec 1945-2000, À la recherche du Québec» de Léon Dion, tome
1, page 117.
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