10 sept. 2013

«De l'étalon-sterling à l'étalon-dollar» de Roger Dehem


Le livre de Roger Dehem intitulé « De l’étalon-sterling à l’étalon-dollar» a été publié il y a un peu plus de quarante ans. Il est riche en connaissances et en réflexions sur les politiques monétaires respectives des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France et de l’Allemagne, notamment entre 1873 et 1971. Comme l’indique bien le sous-titre de cet ouvrage, c’est d’une «Synthèse d’histoire monétaire» dont il s’agit, et elle est particulièrement bien documentée.

Le professeur Dehem y met en évidence les bonnes décisions des autorités politiques et monétaires nationales à certains moments. Il s’indigne toutefois de ce qu’il appelle des «aberrations», et elles furent nombreuses, aberrations qui se sont avérées couteuses pour les citoyens et déstabilisantes pour les économies.

Avec preuves à l’appui, il écrit :

«De toute l’histoire des décisions de politique économique, il n’est sans doute pas d’épisode plus déconcertant que celui de la politique monétaire aux États-Unis de 1929 à 1933.» (page 114).

«Si la politique de stérilisation de l’or au cours des années 1920 fut défendable du point de vue national, celle des années 1929-1933 fut catastrophique, tant au point de vue intérieur qu’à celui du reste du monde. Parmi toutes les politiques qui auraient pu être adoptées pour relancer l’économie interne en 1933, celles qui furent effectivement appliquées furent les pires que l’on puisse imaginer du point de vue externe ; leur efficacité interne est, par ailleurs, discutable.» (page 119).

Et il ajoute :

«Non seulement la gestion monétaire était-elle contraire à l’intérêt mondial, mais elle infligea des souffrances immenses et inutiles au peuple américain.» (page 137).

Ses critiques ne se limitent aux décisions américaines, malgré ce que peuvent laisser croire mes choix de citations. Il en a aussi contre des décisions de pays européens, en particulier les choix de la France à divers moments.

 Il examine en outre les efforts de la communauté internationale pour améliorer la collaboration et la concertation entre les pays pour tenter d’éviter dans l’avenir la répétition des erreurs du passé. Il se penche notamment sur «Le compromis de Bretton Woods» et la «paralysie» du Fonds monétaire international à ses débuts. Il nous livre également ses réflexions sur la faisabilité, à l’époque, de l’union monétaire en Europe.

L’étude du professeur Dehem s’arrête à la décision des États-Unis, en août 1971, de suspendre la convertibilité-or du dollar. Toutefois, l’histoire des crises monétaires et financières est loin d’être achevée, comme nous le démontre bien l’actualité économique, notamment depuis 2007-2008. Cette fois-ci, la gestion laxiste des risques serait la principale cause de la crise financière. La connaissance de l’expérience des années 1930 a, à tout le moins, amené les autorités publiques et monétaires à intervenir avant que cette crise ne se transforme en désastre. Politiques monétaires expansionnistes, dépenses gouvernementales en infrastructures et plans de sauvetage des banques et d’industries, notamment celle de l’automobile en Amérique du Nord, se sont conjugués afin d’éviter le pire.

Enfin, pour compléter la lecture de ce livre, pourquoi ne pas entreprendre celle de «The Ascent of Money» de Niall Ferguson,  publié en 2008. Il y a déjà trop longtemps que ce livre repose sur une tablette de ma bibliothèque.


Référence : Dehem, Roger. «De l’étalon-sterling à l’étalon-dollar». Calmann-Lévy, 1972. 222 pages.

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