Adam Smith est le « …. père
fondateur de l’économie politique », selon Thierry C. Pauchant. « …Smith was
much more than just an economist. He was a philosopher-psychologist-historian-sociologist
who conceived a vision… », selon Robert L. Heilbroner. Il est le « … personnage
le plus fameux de tous les économistes… », même si « l’économie n’était qu’une
partie de son œuvre », selon Joseph A. Schumpeter.
Examinons ici de façon
succincte ce que ces trois auteurs retiennent de particulier dans leur analyse
des écrits de Smith.
Pauchant
Ce grand personnage serait « l’antidote
ultime au capitalisme », selon Pauchant. Cet auteur insiste sur la
falsification de la pensée de Smith par, entre autres, des intégristes du
laissez-faire. Il met en évidence l’importance que Smith accorde à ce que
l’économie offre des revenus ou des moyens de subsistance au peuple et de quoi rendre
les citoyens capables de développer leurs talents, leurs projets et d’atteindre
leurs objectifs personnels ou sociaux.
L’État est loin d’être exclu
de la pensée de Smith : il préconise de lui donner des moyens suffisants d’assurer
les services publics, services qui vont « … bien au-delà de la défense
nationale et de l’administration de la justice. » Ce qu’il est convenu
d’appeler de nos jours l’économie sociale occuperait une place de choix dans
les écrits de Smith.
Aussi, Smith était « …
résolument contre l’impérialisme, le colonialisme et l’esclavagisme. »,
toujours selon l’analyse de Pauchant.
Enfin, le « capabilisme »,
inspiré des écrits de Smith, retiendrait l’attention de bien des auteurs ces
années-ci, dont Pauchant qui en fait un thème majeur de son essai.
Heilbroner
L’esprit de synthèse de
Heilbroner sur la vie et l’œuvre de Smith est remarquable. Il réussit le tour
de force de présenter une biographie concise et une vue d’ensemble de sa
contribution intellectuelle en un peu plus d’une trentaine de pages.
Smith observe et décrit
l’économie britannique au dix-huitième siècle, avant l’avènement de la
révolution industrielle, révolution teintée en particulier d’abus marqués
envers les travailleurs. Il a consacré douze ans de sa vie à rédiger les
centaines de pages de « The Wealth of Nations ».
Bien des concepts comme
l’économie de marché, la concurrence et le laissez-faire font partie de
l’analyse économique avant Smith. Sa contribution originale, selon Heilbroner,
a été de présenter une vision d’ensemble :
« …the great panorama of the
market remains as a major achievement. To be sure, Smith did not discover
the market ; others had preceded him in pointing how the interaction of
self-interest and competition brought about the provision of society. But Smith
was the first to understand the full philosophy of action that such a
conception demanded, the first to formulate the entire scheme in a wide and
systematic fashion. He was the man who made England, and then the whole western
world, understand just how the market kept society together, and the first to
build an edifice of social order on the understanding he achieved. »
« Indeed, The Wealth of
Nations and The Theory of Moral Sentiments, together with his few
other essays, reveal that Smith was much more than just an economist. He…conceived
a vision that included human motives and historic stages and economic
mechanisms…From this viewpoint, The Wealth of Nations is more than a
master work of political economy. It is
part of a huge conception of the human adventure itself. »
Schumpeter
Adam Smith est parmi les
auteurs les plus cités de l’histoire de l’analyse économique de Schumpeter. Il y
souligne sa contribution à l’évolution des connaissances. Il se distingue en
faisant largement état de là où le temps et les analyses ont donné raison à
Smith, et de là où les remises en question et les critiques ont pu démontrer
qu’il avait tort. Des commentaires et des critiques sur l’œuvre de Smith «
…sont éparpillés dans tous les traités économiques et les travaux du XIXe siècle;
ce sont eux qui constituent le véritable monument à la gloire de Smith,
l’économiste scientifique. », scientifique qui toutefois « …n’aimait guère ce
qui allait au-delà du simple bon sens. », toujours selon cet auteur.
Preuve de l’attrait de l’œuvre
de Smith, Schumpeter indique que, déjà avant la fin du dix-huitième siècle, The
Wealth of Nations avait connu neuf éditions anglaises, sans compter celles
publiées en Irlande et aux États-Unis, et elle avait été traduite en danois, en
flamand, en français, en allemand, en italien et en espagnol. S’ajouta une
version en russe au début du siècle suivant.
Smith devint en quelque sorte
le professeur des professeurs, selon Schumpeter. Il constituait le point de
départ de leur enseignement, même de ceux dont la contribution allait,
ultérieurement, à certains égards, au-delà de celle du grand maître.
En somme, Smith
observe, il décrit, il analyse et il conçoit des lois de la nature, tout en
s’inspirant des écrits de ceux qui l’ont précédé. Son œuvre est dense et
nuancée, ce qui laisse place à bien des interprétations en fonction des
intérêts particuliers de ceux qui en font une lecture tronquée. Il s’abstient, aussi,
de jouer au prophète, contrairement à Karl Marx au dix-neuvième siècle.
P.S. : Les paragraphes
qui précèdent ne sont qu’un commentaire de lecture. Ils ne donnent qu’un bien
mince aperçu du contenu des trois sources mentionnées ci-dessous.
Pauchant, Thierry C. « Adam
Smith, l’antidote ultime au capitalisme Sa théorie du capabilisme ». Dunod,
2023. 169 pages
Heilbroner, Robert L. « The
Wordly Philosophers » chapître intitulé « The Wonderful World of Adam
Smith ». Simon & Schuster, 1999 (7ième édition). Pages 42 à
74.
Schumpeter, Joseph Alois. « Histoire
de l’analyse économique ». Éditions Gallimard, 1983. Trois tomes, plus de
1 600 pages. (La version originale en anglais a été publiée en 1954.)