Ici, au Québec, tout le
monde connaît la Journée nationale des Patriotes puisque c’est un jour de congé
férié le lundi précédant le 25 mai. Mais, qui peut prétendre bien les connaître
nos Patriotes d’antan? Gilles Laporte, lui, les a bien étudiés, et il partage
avec nous ses connaissances en en publiant une synthèse.
Son livre nous renseigne sur
le contexte social, économique et politique de la première moitié du
dix-neuvième siècle, sur les «quarante ans de lutte politique» de cette époque,
sur l’étendue de la «mobilisation» dans les diverses régions du Bas-Canada, sur
les insurrections de 1837 et de 1838 et la «mise en échec» des Patriotes. Il
nous dresse aussi un portrait individuel de cinquante leaders du «mouvement
patriote», dont Louis-Joseph Papineau, Robert et Wolfred Nelson, George-Étienne
Cartier et Louis-Hippolyte La Fontaine. Certains ont été pendus, d’autres se
sont exilés ou se sont fait imposer l’exil, quelques-uns sont mêmes devenus des
bâtisseurs du Canada de 1867.
Les Patriotes ont été des
précurseurs à bien des égards, selon Laporte, en militant pour la presse libre
et la liberté d’expression, en constituant le premier parti politique organisé,
en mettant sur pied le premier réseau scolaire laïque, en accordant aux Juifs
le droit de siéger au Parlement, en célébrant la première Fête nationale du
Québec et en contribuant à l’avènement de la «responsabilité ministérielle».
Ils ont aussi dénoncé la peine de mort et réclamé des élections à tous les
échelons du gouvernement, le suffrage universel, l’éducation gratuite et
obligatoire, l’égalité de droits entre Blancs et Autochtones et l’établissement
d’une république libre de toute attache à l’Angleterre (page 11).
Le Parlement où ils
siégeaient n’avait cependant que peu de pouvoirs. Ils se limitaient, pour
l’essentiel, à imposer des taxes pour financer les activités édictées par le
Gouverneur. En découla une crise politique majeure qui vint s’ajouter à une
crise sociale due à l’absence des francophones de la plupart des réseaux
économiques et commerciaux et des lieux de pouvoir décisionnel. La crise
sociale et la crise politique devinrent aussi une « crise ethnique» (pages 300
à 305) au moment des affrontements de 1837 et de 1838.
Nos patriotes étaient bien
organisés, structurés, éloquents, rassembleurs sur le plan politique, mais ils
étaient, selon l’auteur, sans préparation et sans véritables moyens pour
affronter la puissance militaire de la Grande-Bretagne qui avait ultimement
décidé d’en finir avec les rebelles.
Une fois l’insurrection
matée, Lord Durham en est venu à proposer «…à la fois d’accorder la
souveraineté à la colonie sur les affaires intérieures et de promptement
assimiler les Canadiens français à la culture anglo-saxonne,…» (page 305).
L’histoire s’écrira autrement sur la question de l’assimilation.
Un livre à lire pour bien
comprendre le contexte politique et socio-économique de l’époque des Patriotes
et l’avènement de la contestation de l’ordre établi qui se transforma en
rébellion, et d’où émergera une plus grande démocratie parlementaire au Canada.
Référence : Laporte,
Gilles. «Brève histoire des Patriotes». Les éditions du Septentrion, 2015. 361
pages.
http://www.septentrion.qc.ca/catalogue/breve-histoire-des-patriotes